CHAPITRE 23

Spence parcourait d’un pas mal assuré, mais avec obstination, une étendue rocailleuse et étrange. Par-dessus son épaule, la sphère parfaite et bleutée de Deimos s’élevait contre le noir du ciel. Spence grimaça de douleur tandis que des éclats acérés de roche lui cisaillaient les genoux. Des gouttes de sang perçaient d’une petite déchirure dans sa combinaison de surface.

Frissonnant, il tenta de se réchauffer en drapant ses bras sur sa poitrine. En regardant au-dessous de lui, il vit qu’il se tenait sur un éperon rocheux, teinté de rouge dans la lumière du soleil couchant. Tout autour de lui des diamants scintillaient d’un éclat froid. Avec surprise, il réalisa que ce n’étaient que ses propres larmes qui avaient gelé en tombant sur la roche nue. Il leva les bras, remit son casque et reprit sa marche.

Combien de temps avait duré la marche et quelle était la distance parcourue, il n’en avait aucune idée.

Très haut, de légers nuages effilochés, comme des voiles déchirés, traversaient à toute allure le ciel noir, portés par la tempête qui s’annonçait, pour disparaître au-dessus de l’horizon. Il entendait hurler le vent qui s’engouffrait sans retenue dans l’espace vide au-dessus de lui. Il voulait courir, pour voir où allaient les minces nuages blancs. Mais plus il tentait de s’activer et plus une sorte de lourdeur venait miner ses forces. Ses jambes n’obéissaient plus. Il se donnait tête baissée à l’effort, pour se sentir repoussé comme par une main énorme, et il réalisa que c’était le vent. Chaque pas était plus lent que le précédent. Regardant autour de lui, il voyait le sable rouge filer en sifflant comme un nid de serpents emporté par la tempête.

Il rampa jusqu’au sommet d’une dune proche et se laissa tomber de l’autre côté, à l’abri du vent. Il se sentait glisser de plus en plus bas. Le sable retombait sur lui du sommet de la dune, fouetté par le vent sans relâche. Il s’effondra, trop transi et fatigué pour bouger. Le sable continuait à tomber sur lui comme une averse, l’ensevelissant sous un fin manteau rouge.

Il se mit à hurler et sa voix sonnait creux à ses propres oreilles. Regardant autour de lui, il constata qu’il se trouvait enfermé dans une grosse bulle de verre, la bulle de son casque dont la visière commençait à se givrer sous l’effet de la chaleur produite par sa respiration.

Le sable semblait se déverser du ciel obscur et il était en train de l’enterrer vivant. Il ressentait la piqûre des impacts à travers la surface de sa combinaison. Il entendait, assourdi, le crissement sec du sable sur son casque.

De nouveau, il poussa un cri et n’entendit qu’un terrifiant écho muet : il comprit alors que ses cris ne pouvaient être entendus au-delà de la sphère de son casque. Il claquait des dents de froid, ce froid qui le paralysait et l’entraînait vers le sommeil. Le sommeil, son dernier ennemi, était sur le point de vaincre.

Spence reprit conscience petit à petit, tous ses sens émoussés, comme s’il avait été drogué. Une lumière crue assaillait ses paupières et il dut les plisser pour s’en protéger. Et comme elle ne s’éloignait pas, il finit par ouvrir les yeux et regarder autour de lui.

Il n’eut pas conscience tout d’abord du lieu où il se trouvait, ni de son état. Ses oreilles résonnaient de son propre souffle, calme et régulier et il savait qu’il portait sa combinaison de surface et son casque. Mais son corps était raide et figé dans une certaine position. Il tenta de lever un bras et constata qu’il se libérait avec difficulté. Il leva l’autre bras et parvint peu à peu à se mettre en position assise.

Et tout d’un coup, cela lui revint ! Il était sur Mars. Il était parti seul se promener sur sa surface. Son rêve avait bien été réel ! Son parcours chaotique dans ce paysage n’était pas un cauchemar : c’était bien du réel. De plus, il s’en souvenait, bien que dans son souvenir cela tînt davantage du rêve.

Avant cela, cependant, c’était le vide et, de nouveau, la perte de connaissance.

Spence se mit debout et brossa le sable qui le recouvrait. Il remonta au sommet de la dune et contempla l’étendue du désert rouge, tentant de maîtriser le sentiment de panique qu’il sentait monter en lui. Aucune trace des installations de la base, pas un signe dans aucune direction.

Le vent s’était calmé, mais vers le sud – tout au moins ce qu’il estimait être la direction du sud –, le ciel était nettement taché d’une couleur rouge foncé, comme si un feu de broussaille non maîtrisé brûlait juste au-dessous de l’horizon. Au zénith, le ciel était légèrement teinté de rose ce qui indiquait qu’il était près de midi.

Il se trouvait devant un problème. De toute évidence il ne pouvait pas rester assis là à attendre qu’une équipe de secours le découvre, et il ne pouvait pas non plus partir dans toutes les directions à la fois. Il regarda sur son bras droit le chronomètre attaché à sa combinaison et le régla de façon qu’il indique la durée écoulée, estimant qu’au mieux, il lui restait sept heures avant que la température ne tombe sérieusement et qu’il commence à geler.

Il décida de se diriger tout d’abord en direction d’une montagne qu’il voyait s’élever dans un air si pur qu’il lui semblait qu’il pouvait la toucher du bout des doigts. Il se souvenait de l’holocarte et du fait que le mont Olympe n’était qu’à une trentaine de kilomètres des installations de la base. S’il pouvait l’atteindre, il avait une bonne chance de pouvoir, de ses pentes, les apercevoir. C’était une course contre la montre, car il fallait parcourir entre cinquante et soixante kilomètres en sept heures, huit heures au plus. Pour avoir la moindre chance d’être de retour à la base avant l’heure fatidique, il lui faudrait se déplacer à une vitesse de sept à huit kilomètres à l’heure.

Sans perdre une seconde, il mit le cap sur la montagne et partit à grandes foulées.

Il marchait depuis plusieurs heures – c’était son impression – mais le cône aplati du mont Olympe ne paraissait pas plus proche. De temps en temps il s’arrêtait pour inspecter les environs, voir s’il n’avait pas manqué un signe donné par une équipe partie à sa recherche, ou la moindre indication qu’il approchait du but.

À l’occasion d’un de ces arrêts de reconnaissance, il réalisa que la tache brunâtre qui barrait l’horizon au sud avait pris des proportions considérables. Elle occupait maintenant tout le quart sud, s’élevant en hauteur, d’après ses estimations, à plusieurs kilomètres. Tandis qu’il était là, à essayer d’évaluer les proportions de la perturbation, il comprit d’un seul coup, avec terreur, la nature du danger : le simoun. La tempête se propageait, dans sa direction, suivant des courants d’une violence inconnue de lui jusque-là.

Spence se mit à forcer l’allure, rebondissant maladroitement à chaque pas. Il lui fallait atteindre la montagne avant l’arrivée du simoun. C’était sa seule chance.

Les premiers coups de vent le frappèrent comme autant de coups de poing. Autour de ses jambes, le sable sifflait comme de la vapeur s’échappant d’un tuyau. La force de la tempête qui s’approchait le poussait, le soulevait et le projetait en avant. Il poursuivait en titubant, épuisé, trempé de sueur à l’intérieur de sa combinaison, la langue collée au palais par la soif. Il fixait la nuée brune qui envahissait maintenant le ciel comme un parasol délavé. La brûlure du soleil, lumière blanche et vibrante, accompagnait ses efforts.

Il se déplaçait maintenant de façon mécanique, sans prendre garde. Le fait d’atteindre la montagne ou non ne l’intéressait même plus. Il désespérait de retrouver, à travers les nuages opaques de sable rouge, fouettés par les vents du simoun, les installations de la base. Spence ne marchait plus que pour oublier l’horrible fin qui l’attendait à quelques heures de là.

Il poursuivait sa marche au milieu des vents qui remplissaient le ciel de poussière et gommaient toute vision du paysage. De minuscules projectiles, grains de sable ou éclats de roche, le bombardaient en permanence. Il sentait leur impact à travers sa combinaison et savait qu’il ne faudrait pas longtemps à ce mitraillage continu pour arracher définitivement sa combinaison et le laisser comme nu sous cette pluie mortelle.

Les pronostics funestes de Parker résonnaient à ses oreilles : « Vous seriez réduit en poussière en quelques secondes…» Spence repassait dans sa tête le détail compliqué de cette forme de mort : la chair arrachée des os, molécule par molécule, puis les os eux-mêmes réduits en fragments et répandus encore chauds sur la surface de la planète pour finir en poussière.

Il imaginait la scène avec une fascination morbide, bien qu’il sût que cela risquait d’être son lot. Cela ou la mort par le froid. Tels étaient ses choix.

Le soleil descendait dans le ciel et le vent qui soufflait autour de lui commençait à fraîchir. Bientôt la température plongerait et il s’immobiliserait à mesure que se dissiperait la chaleur de son corps. Ce type de mort paraissait au moins préférable à l’autre.

Il se déplaçait maintenant à l’aveuglette. La poussière obscurcissait tout ce qui se trouvait à l’extérieur de la surface en plastique de sa visière. Le bruit répété du choc de ces missiles minuscules remplissait son casque comme autant de décharges d’électricité statique et ses pensées se tournaient vers ceux qui porteraient son deuil : cela serait dur pour son père, bien sûr, et pour sa sœur. Adjani serait aussi touché, mais Spence avait du mal à imaginer que ce génie au teint sombre pût éprouver à son égard un réel sentiment de perte.

Ari, parmi tous ceux qui lui venaient à l’esprit, incarnait le seul vrai regret de sa vie. C’était la seule personne chère à son cœur. Et il ne la verrait plus jamais : ses yeux vifs et si bleus, sa chevelure dorée dans la lumière du soleil, la fraîcheur de ses longs doigts caressant son visage. La terrible perspective de leur séparation l’affectait et l’effrayait plus que la mort elle-même.

Il espérait que d’une certaine façon, il laisserait dans sa vie un petit vide qui ne serait jamais comblé par un autre, qu’elle se souviendrait de lui avec tendresse et qu’elle pleurerait à la nouvelle de sa mort.

Il se souvenait de ses paroles, le soir précédant son départ. Il entendait sa voix lui répéter : Soyez prudent, Spencer… Je prierai pour vous tous les jours.

La prière n’y peut rien, pensa Spence, pas plus, sans doute, qu’autre chose. Du moins, une prière ne pouvait pas faire de mal. L’idée lui semblait à cette heure plutôt appropriée. Il souhaitait seulement trouver les mots justes pour que cette première et probablement dernière prière ne soit pas qu’un acte de circonstance de la part d’un agnostique mourant.

Il sentit l’émotion l’envahir : les larmes lui vinrent aux yeux et roulèrent sur ses joues à l’intérieur du casque. Il ne pouvait pas les essuyer.

Avec les larmes vinrent les mots : « Je suis désolé, je suis désolé…» qu’il ne pouvait s’empêcher de répéter. « Pardonne-moi », murmurait-il. « Aide-moi. »

Telle fut sa prière, mais ce qu’il regrettait, ce pour quoi il demandait pardon, seul son cœur le savait.

Il avait à peine prononcé ces mots qu’il fut terrassé par un coup de blizzard, d’une force inimaginable, dans un grondement de bête sauvage à l’agonie.

Il était là, étendu immobile sous une pluie de pierres et de graviers. Il lui était difficile de relever la tête, emprisonnée par son casque, mais il sentait que pour vaincre le froid qui l’envahissait, il lui fallait bouger à tout prix. Tant bien que mal, il se mit à ramper sur le ventre.

Il n’était pas allé bien loin quand il eut l’impression que le vent se calmait. Il se redressa sur les genoux, puis debout. Il fit quelques pas hésitants et le vent le frappa de nouveau, le projeta en avant et l’envoya rouler comme un ballon.

Il se sentait rouler, et rouler, comme s’il avait perdu toute prise sur le sol et que rien ne pouvait l’arrêter. Et il ne s’arrêta pas : c’est alors que le vent cessa ses attaques. Il était tombé la tête la première dans un arroyo : un de ces petits canaux qui sillonnaient la surface de la planète. Là, il était hors de portée du vent et à l’abri des projectiles emportés par ses bourrasques.

Sa vision était à peine meilleure qu’auparavant : une épaisse nuée de poussière remplissait l’arroyo, apportée par le vent en surface. Tête baissée, Spence se fraya un chemin sur la surface rocailleuse du lit asséché de la rivière. L’obscurité augmentait rapidement et il sentait le froid descendre avec le coucher du soleil.

Petit à petit, il se rendit compte qu’il progressait sur une pente descendante. L’arroyo était de plus en plus profond, et, pour autant qu’il pût en juger quand les nuages de poussière s’écartaient, il s’élargissait pour se transformer en un véritable canyon.

Il marchait mécaniquement, avec pour seule préoccupation d’avancer jusqu’à ce qu’il s’effondre sous le coup de l’hypothermie. Il savait qu’alors la mort viendrait vite, et qu’il ne sentirait rien. Cela valait tout de même mieux que de se faire pulvériser par le blizzard.

La pente s’accentua rapidement pour arriver à une surface totalement plane. Spence s’arrêta et les nuages de poussière s’écartèrent. À la faveur du dernier rayon de lumière du jour, il aperçut une scène qui le fit vaciller. Ses genoux se dérobèrent quand il voulut s’en écarter.

Il avait atteint le rebord de la faille. Il se trouvait maintenant surplombant un gouffre s’étendant devant lui sur des centaines de kilomètres, profondément taillé dans la croûte de la planète. Un pas de plus l’aurait fait plonger vers la mort.

Sa réaction devant ce nouveau danger fut purement physique. Dans son esprit, la perspective de sa disparition prenait moins d’importance qu’elle n’en aurait eue à un autre moment de sa vie. Il était simplement trop épuisé, et trop engourdi par le froid pour s’en faire : un fait, nota-t-il, qui montrait bien que l’hypothermie commençait à faire son travail.

Il n’y en avait plus pour longtemps, maintenant.

Mourir, c’était donc cela, pensa-t-il : sentir la force vitale s’échapper et en être parfaitement conscient. Il se demanda s’il éprouverait le fameux sentiment de délivrance dont on parlait généralement dans ces cas-là, s’il retrouverait sa mère parmi les âmes de tous ceux qui étaient passés dans l’autre monde, ou si tout cela, comme tant d’autres choses, n’était que superstitions d’un âge révolu.

Il ne pensait à rien en cet instant. Il contemplait les ombres sur les parois du canyon foncer jusqu’au violet tandis que ses profondeurs étaient déjà englouties dans le noir absolu. Au-dessus de lui le simoun hurlait, comme si on avait laissé tous les démons de l’enfer venir assouvir leur furie sur cette terre désolée.

Il ressentit sous ses pieds une secousse, une vibration du surplomb rocheux sur lequel il se trouvait. Il se retourna et aperçut une masse qui se déplaçait le long du bord de la faille et se dirigeait vers lui.

Un rocher, érodé par le vent, s’était détaché et provoquait une avalanche qui le menaçait directement. Il n’eut que le temps de s’aplatir au sol avant d’être entraîné dans l’amas de roches et de débris qui dévalait la pente.

L’avalanche l’entraîna plus profondément encore à l’intérieur du canyon. Miraculeusement, il n’avait pas été aussitôt broyé par le tourbillon de matériaux. Quand la chute s’arrêta, il se retrouva allongé, haletant, à la surface. Des cailloux de toutes tailles continuaient à le mitrailler, mais il n’avait ni la force ni la volonté de bouger.

L’implacable étau de la nuit martienne se resserra sur lui, et il perdit connaissance.

Le voleur de rêves
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